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DESACRALISATION DU «TAMBOUR PARLEUR» AVANT SA RESTITUTION A LA COTE D’IVOIRE

Qualifié de «parleur», ce tambour était plus qu’un instrument de musique, c’était un outil de communication. Il permettait à ce peuple de la région d’Abidjan de prévenir les villages lorsque les colons français venaient réquisitionner les populations.

L’objet a été pillé par les Français, en 1916. Paris s’est engagée, l’an passé, à le restituer, mais avant son retour, une restauration est nécessaire. Pour permettre la restauration de cet objet sacré, une cérémonie rituelle était organisée, ce lundi 7 novembre, au Musée du Quai-Branly, en présence de membres de la communauté bidjan.

 En déambulant vers la Muséo¬thèque, où est actuellement exposé le tambour, les dix représentants de la communauté bidjan dont trois chefs de village, ont d’abord entonné, à l’aide d’un cor et d’un tambour, des chants de guerre, comme le faisaient leurs ancêtres avant de partir au combat. Une fois arrivés dans la salle, la cérémonie rituelle a pu débuter.

Les membres de la communauté ont entrepris la désacralisation du tambour, en demandant à l’esprit qui est à l’intérieur de se retirer. Ils ont effectué sept fois le tour du «Djidji Ayokwe», pour signifier le nombre de villages bidjan. Une libation a également été faite par le chef du plus ancien village bidjan, Cocody village.

 Cette cérémonie était nécessaire pour permettre à des mains profanes de restaurer cet objet sacré. Sa base est en effet infestée par les termites. Et pour cause : le «Djidji Ayôkwé» est resté dehors, de 1916 à 1930, posé à même le sol dans les jardins de la résidence de l’administrateur colonial à Bingerville. Une entreprise spécialisée va donc se charger de consolider le tambour et de le poser sur un socle, des travaux de restauration qui doivent débuter le 15 novembre prochain.

Processus de restitution

Ce retour du tambour parleur, «Djidji Ayokwe», est donc préparé par les communautés bidjan du village d’Abidjan-Adjamé. Le tambour devrait leur être restitué en 2023. Bénédicte Savoy, historienne de l’art et co-autrice d’un rapport sur le patrimoine africain, revient sur les blocages qui ont, jusque-là, retardé ce processus : «Pendant 100 ans, les Européens ont surtout souffert d’un blocage psychologique. Il était pour eux pratiquement impossible de penser la restitution. Ce grand blocage-là est parti. L’autre blocage qui l’accompagnait, qui était un soi-disant blocage législatif, c’est-à-dire que la France annonçait toujours l’argument de l’inaliénabilité des collections, de l’imprescriptibilité des spoliations. Ces éléments juridiques-là ont été annulés par une nouvelle loi qui a permis la restitution des 26 pièces de la République du Bénin. Pour le tambour, une loi doit aussi être votée au Par¬lement et dans la situation parlementaire actuelle en France, c’est une question de temps, probablement…»

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