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«LA COMMANDE EXTERIEURE, CE N’EST PAS MA PREOCCUPATION »

Journaliste, Alioune Ndiaye est désormais un «gourou» de la création audiovisuelle. Le directeur de la société de production «Pikini» a écrit de sa main l’une des séries les plus controversées. «Famille sénégalaise» suscite moults réactions à chaque diffusion. Mais l’ancien journaliste est clair, la série s’adresse d’abord à un public sénégalais.

Pikini Production est déjà bien implantée dans la production audiovisuelle sénégalaise. Un petit regard dans le rétroviseur ?

Les productions, je pense qu’on en a fait au moins dix. Avec 8 films, je pense. Les émissions, on les diffuse dans les télévisons, c’est du revenu sharing. Par exemple, à un moment, on a eu une émission sur la Tfm, Table Ya Ngoné, qui est une émission de télévente. On a aussi diffusé une émission, Leçon de mariage, sur la Sen Tv, une autre émission qui s’appelle Sargal. J’ai dirigé le projet de la Télé futurs médias (Tfm), j’ai voyagé partout dans le monde et cela m’a permis de connaître la part importante qu’occupe la production. C’est ce qui m’a poussé à mettre en place ma structure. On produit des émissions, on va chercher des sponsors et la télé va aussi chercher des sponsors, après, il y a une clef de répartition. Ce sont des revenus sharing. Notre modèle économique, c’est la vente de nos produits. Il y a Canal qui est là, à travers Sunu Yeuf, qui achète nos produits et il y a l’exploitation de YouTube qui nous permet d’équilibrer nos comptes. Mais, je suis journaliste de base pour reprendre le doyen Mame Less Camara.

Vos séries les plus en vue sont Famille sénégalaise et Dikoon. Et certains vous reprochent de vous focaliser trop sur l’amour. Que répondez-vous ?

Je ne m’intéresse pas seulement à l’amour. Disons qu’il y a des produits de grande consommation qui sont les produits liés à la famille, à l’histoire de la famille. Vous savez, j’ai fait toute ma carrière dans le monde des mass médias. Ce que j’ai appris, c’est qu’on ne fait pas de la stratégie par l’offre, on fait de la stratégie par la demande. C’est-à-dire ce que les gens ont envie de regarder, c’est ça qu’il faut leur montrer. A côté maintenant, vous pouvez leur proposer d’autres produits, des produits nouveaux qu’ils peuvent accepter, qu’ils peuvent ne pas accepter. Nous avons beaucoup de films qui traitent de la famille. On a même crée une série qui s’appelle Bess, qui parle des évènements qui arrivent dans la vie de tous les  jours. C’était carrément une série, mais elle n’a pas eu le même succès que les feuilletons que nous proposons sur le thème de la famille. Il y a ce qu’on appelle en sociologie, la Pyramide de Maslow. Et cette Pyramide de Maslow, c’est en fonction des niveaux de vie, des centres d’intérêt des individus. On a senti que les niveaux de vie ne sont pas élevés, donc l’intérêt est centré autour de la famille. On n’est pas dans l’abstraction, on est plus dans la famille, on est dans ce qu’on vit, dans ce qu’on voit. Nous ne faisons pas que ça. Même dans les films où nous traitons d’amour, de famille, si vous regardez bien la sociologie d’écriture, il y a des messages qui dépassent le cadre de l’amour et de la famille pour les gens qui regardent vraiment. Il y a des gens qui me reprochent que l’on parle beaucoup d’amour. Mais non ! Il y a des films où on parle de polygamie. Si vous regardez bien, si vous entendez bien, on parle d’autres choses. Parce que je ne fais pas de films pour les Chinois ou pour les Européens. Je fais des films d’abord pour les Sénégalais, maintenant si après consommation sénégalaise, le produit intéresse quelques autres, c’est tant mieux. J’écris les films que je produis et j’écris d’abord pour les Sénégalais. Mon esprit et mon objectif, c’est de faire quelque chose qui intéresse les Sénégalais. La commande extérieure, ce n’est pas ma préoccupation première.

Combien coûte la production d’une série ou d’un téléfilm ?

Ça dépend du film. Ça dépend de ce qu’on fait. Ce qu’on fait, encore une fois, ce n’est pas du théâtre, ce sont des téléfilms, des feuilletons ou des séries. Ça dépend du projet qui peut coûter très cher. Je vois des gens faire un projet dans un appartement. Il y a peu de scènes extérieures, il y a peu de gens. Un projet comme ça peut se faire avec 25 millions de nos francs. J’entends souvent les gens raconter, surtout  dans les réseaux sociaux, que ceux qui travaillent dans la pro¬duction ne sont pas payés. S’ils ne sont pas payés, ils ne vont pas travailler. Les gens qui travaillent doivent être rémunérés. Ça c’est clair ! Ils viennent travailler pour être payés.

Peut-on savoir le cachet que vous payez aux artistes comédiens que vous engagez dans vos productions ?

Ça dépend. C’est comme faire travailler un journaliste. Moi j’ai dirigé un groupe de presse, le Groupe futurs médias, j’ai dirigé un journal et une radio. C’est comme ça si vous engagez quelqu’un pour le travail, à la seule différence que les comédiens, ce sont des intermittents. On signe des contrats. Je ne peux pas me mettre à révéler le cachet des gens. Ce n’est pas décent. On discute, on tombe d’accord en fonction des critères pour la rémunération.

Quel est le chiffre d’affaires de Pikini Production depuis sa mise en place en 2015 ?

(Eclat  de rire) Je ne peux entrer dans les détails. Je ne peux pas donner de chiffre. C’est la cuisine interne de notre entreprise. On fait face à nos engagements. Des maisons de production, dans des économies beaucoup plus développées, brassent beaucoup d’argent. Il faut multiplier les sources de revenus. Orange a lancé Wido, sa plateforme de téléchargement. Nous allons travailler avec eux, mais il y a d’autres sources de revenus aussi.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face ?

Pour moi, si vous voulez réaliser quelque chose, il y a des obstacles, il y a des difficultés, il y a des choses qui se dressent devant vous. Je ne me pose jamais de questions sur quelle difficulté je vais rencontrer. C’est normal.  Il faut négocier avec les artistes, ce qui n’est pas commode. Maintenant moi, je ne suis pas de ceux qui disent qu’on devrait avoir des financements. Le Fonds de promotion de l’industrie audiovisuelle (Fopica) est là. Aujourd’hui, au Sénégal, la série la plus suivie, c’est la série Famille sénégalaise.

Vous vous basez sur le nombre de personnes qui l’ont regardée sur YouTube par exemple ?

Non on est à quatorze, quinze épisodes. Et sur internet, on fait entre 2 millions, 2 millions 500, 3 millions de vues par épisode. Allez sur YouTube, allez sur notre chaîne, vous allez voir. En ce moment, Famille sénégalaise est la première série au Sénégal. Et je ne parle que de YouTube. Je ne parle pas de ce qu’on fait à la télé. Dans l’hypothèse qu’on fasse le même score à la télévision, on ferait 6 millions de vues.

Cela vous permet de mettre la main sur une grosse somme d’argent ?

Oh non. En fait, les gens commettent l’erreur de dire que si tu as 2 millions de vues, tu as 2 millions de francs. YouTube paie en fonction des publicités. Ce sont eux-mêmes qui décident d’en mettre ou de ne pas en mettre, en fonction de l’audience. Il y a aussi d’autres critères. C’est aléatoire.

Quels sont vos projets ?

Mon ancien projet est toujours mon projet. Mon projet a été toujours de créer une société de média. Ça n’a pas changé.

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