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LE CAÏLCÉDRAT, UN PARRAIN EN PÉRIL

Parrain de la 39ème édition de la Journée nationale de l’arbre, le caïlcédrat, «khaya senegalensis» de son nom scientifique, est un patrimoine en péril. L’arbre emblématique de la ville de Thiès disparait progressivement du fait de l’abattage, l’élagage abusif et l’écorçage illicite. Une situation qui a longtemps inquiété des mouvements citoyens, qui exigent l’arrêt immédiat de ce massacre. Le Service des Eaux et forêts précise que l’abattage et l’élagage répondent à une procédure bien précise. Avant d’informer qu’un programme de reboisement de 40 mille caïlcédrats est en cours pour reconstituer le peuplement vieillissant de ces arbres.

Le gouvernement du Sénégal, dans sa politique de protection de la nature, a institué une Journée nationale de l’arbre depuis 1983. La 39ème édition sera fêtée ce dimanche à Thiès, sous la présidence du ministre de l’Environnement et du développement durable, Abdou Karim Sall, avec comme arbre parrain, le caïlcédrat. Et le choix du caïlcédrat comme parrain de l’édition 2022 de la Journée de l’arbre repose, en effet, sur le constat que cet espèce, qui incarne un charme écologique et berce depuis l’époque coloniale les férus de la nature, disparait progressivement du fait de l’abattage, l’élagage abusif et l’écorçage illicite. Une situation qui inquiète des mouvements citoyens qui, depuis quelques années, exigent l’arrêt immédiat de ce massacre.

Selon eux, l’arbre, qui constitue un patrimoine écologique et culturel de la ville de Thiès, est gravement menacé par diverses agressions d’origine anthropique. Un massacre ! Aussi, d’autres déperditions sont régulièrement enregistrées du fait de la vieillesse des sujets et de l’absence d’un programme de traitement sylvicole approprié. En clair, cette espèce est en voie de disparition. Et le mouvement Y’en a marre, section de Thiès, avait demandé l’arrêt immédiat de l’agression permanente exercée par l’homme sur cet arbre emblématique de la Cité du Rail.

Pour le mouvement citoyen, aucun motif ne justifie aujourd’hui cette forte agression exercée sur ces caïlcédrats légendaires, qui constituent un patrimoine important dans la préservation de l’écosystème, se trouvant dans toutes les grandes artères de la ville et les bases militaires. Ainsi Bassirou Diop, coordonnateur du mouvement, et ses camarades plaident pour la préservation de ce patrimoine. Pour cela, ils avaient demandé au Service régional des Eaux et forêts de Thiès de mettre un terme à la délivrance des permis d’abattage. «Il est constaté un mouvement d’abattage clandestin de caïlcédrats ou khaya en wolof.»

Conséquences : «Les arbres sont en train de tomber un à un dans la ville. A ce rythme, cette espèce historique risque de disparaître à jamais à Thiès. Et pourtant, il s’agit d’un patrimoine qui constitue même son identité. C’est pourquoi nous disons stop à ce désastre», avait indiqué Bassirou Diop. A l’en croire, «la vieillesse des arbres ne saurait justifier un tel massacre. Il faut aller vers un encadrement et un plan de remplacement».

En écho, le Commandant Daouda Ndiogou, chef du Service des Eaux et forêts de Thiès, a coordonné beaucoup d’imitatives, en partenariat avec des mouvements citoyens, pour reconstituer le peuplement vieillissant de caïlcédrats qui, à ses yeux, est devenu «très urgent».

Et selon lui, «pour restaurer, il faut d’abord faire un inventaire. Nous venons de terminer l’inventaire forestier du peuplement de khayes de son nom en wolof. Nous avons, à Thiès, 2955 pieds dont 31 pieds morts. Et nous avons constitué un projet de restauration de ce peuplement. Dans ce cadre, nous voulons travailler en synergie avec les collectivités territoriales. Nous avons reçu le maire de Thiès, Babacar Diop, et nous lui avons soumis le projet. Pour dire que nous sommes en train de voir comment le mettre en œuvre».

Mais en attendant, il informe que les Eaux et forêts ont déjà commencé la reconstitution de ce peuplement. «De l’avenue Caen jusqu’à la station Elton à la sortie de Thiès, sur une linéaire de 6 km, nous avons fait une plantation de khayes que nous arrosons chaque jeudi avec notre citerne. Notre mission, c’est de pouvoir reconstituer ce peuplement. Parce qu’un peuplement vieillissant, à un niveau, constitue un danger car les branches, de même que certains arbres, peuvent tomber à tout moment et causer des accidents.»

Ainsi et de solliciter l’implication des populations car, selon lui, «planter c’est bon et facile, mais le problème c’est la réussite. Il faut donc nécessairement une implication des collectivités territoriales et des populations pour la réussite de ce projet». Surtout que le projet vise à planter 40 mille caïlcédrats à l’échelle départementale. «Nous avons une pépinière au niveau de Diakhao, où nous produisons beaucoup plus de plants de khayes. Et à chaque fois qu’on coupe, on restaure.» Il insiste : «Après chaque abattage d’un arbre, il est procédé à un reboisement compensatoire, en vue de pérenniser l’espèce.» Il donne l’exemple de l’école de la Cité Ibrahima Sarr, ex-Ballabey, et de l’avenue El Hadji Malick Sy.

Le patron des Eaux et forêts de Thiès de préciser toutefois sur l’abattage des arbres : «Chaque fois qu’une autorisation d’abattage ou d’élagage est donnée, l’objectif est de protéger l’être humain qui constitue l’alpha et l’oméga de la gestion durable des ressources. Nous ne donnons pas d’autorisations tous azimuts, mais nous le faisons dans un seul but : protéger l’être humain», a-t-il indiqué, évoquant le cas d’un arbre qui s’était effondré durant l’hivernage 2019, tuant une jeune dame. «Pour éviter de telles tragédies, le service prend toutes les dispositions idoines. Mieux vaut abattre les khayas avant qu’ils ne s’abattent sur les individus», dit-il, non sans ajouter que «depuis cet incident, les populations introduisent des demandes d’élagage ou d’abattage, par mesure de précaution».

A savoir que ces caïlcédrats, tenant compte des contraintes climatiques et pédologiques, ont été plantés à Thiès à partir de 1933, au quartier Ballabey de Thiès, et ceci s’était poursuivi jusqu’en 1945, sous la houlette de l’Administration coloniale. Arbre d’une grande utilité, avec le caractère très ombrageux qu’il donne aux artères, le caïlcédrat a été souvent choisi comme arbre parrain des campagnes nationales de reboisement comme en 1995, 1996, 2014 et 2015 et aujourd’hui, en 2022.

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