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LA PRESSE PERD UN JOURNALISTE QUI FAISAIT «DANSER» LES MOTS

Le destin implacable a encore frappé le monde de la presse avec le décès tragique de Soro Diop. Le Sénégal perd une belle plume qui aimait les belles formules.

«Contre la pensée unique, univoque et équivoque». C’est la dernière contribution que le journaliste Soro Diop a publiée quelques heures avant son accident tragique vers  »Buntu Pikine » qui lui a coûté la vie. Dans cette contribution, le défunt journaliste fustigeait l’attaque supposée du maire de Dakar contre «GFM», tout en invitant les hommes de médias à prendre leurs responsabilités contre ce qu’il appelle appelle la pensée unique. C’est dire que l’ancien chef de desk politique du journal «Le Quotidien» était un homme qui aimait les débats contradictoires.

Éloigné des rédactions depuis quelques années, il n’en demeure pas moins que le journaliste, devenu conseiller technique du ministre des Forces armées, participait régulièrement, par ses publications, aux  »frictions » du débat public et n’hésitait pas à prendre des positions tranchées sur certaines questions. Devenu proche du pouvoir, il pointait souvent du doigt l’opposition qu’elle qualifiait de  »nouveaux dictateurs de la pensée ».

Brillant intellectuel, le frère du directeur de la radio ITV Alassane Samba Diop aimait les belles formules et jonglait avec les figures de style. Philosophe de formation, Soro Diop fait partie des étudiants maoïstes qui, à l’université, ont bravé la mort pour faire advenir le Grand Soir comme le souligne son ami et ancien camarade du département de philosophie, El Hadji Kassé. «Nous savions, dans les couloirs du département de philosophie, dans les allées du militantisme politique, que la vie est d’abord un apprentissage difficile de la mort. Les juges athéniens, au nom de la «société», avaient condamné Socrate, philosophe mobile des espaces ouverts, à boire la ciguë. La philosophie naît de cette énigme d’un Socrate qui était prêt à mourir, armé d’une mémorable phrase: « …voici l’heure de nous en aller, moi pour mourir, vous pour vivre. Qui de nous a le meilleur partage ? Nul ne le sait, excepté le Dieu. » Nous sommes bien en présence de l’acte fondateur de l’entreprise philosophique : quête de la vie heureuse », se souvient l’ancien directeur du journal «Le Soleil».

Comme pour dire que ce dernier s’est toujours préparé à cette  »conclusion neutre » de la vie, il indique qu’il partageait avec son ami ce courage face à l’épreuve absurde de la mort. Se rappelant, dans cet hommage posthume, leurs années de luttes estudiantines, El Hadji Kassé affirme :  »Nous étions activement présents dans ces tempêtes de 1984 et 1987, guidés plutôt par nos idéaux révolutionnaires, dont les revendications estudiantines n’étaient qu’un relais vers le Grand Soir. Nos débats étaient denses sur les perspectives du mouvement, nos concepts philosophiques mobilisés pour en éclairer les obscurités et les points les plus porteurs pour la révolution. » En outre, il estime que Soro Diop était un homme prosaïque, poétique et déterminé.

SIDIKI KABA, MINISTRE DES FORCES ARMÉES : «LE PRÉSIDENT S’APPRÊTAIT À LE PRENDRE DANS SON ÉQUIPE DE COMMUNICATION»

Pour sa part, le ministre des Forces armées Sidiki Ka salue un  »fin lettré ». Me SidikiKaba affirme que son conseil était éblouissant par la puissance de ses idées, l’élégance de son style et la fluidité de sa parole. A l’en croire, le Président Macky Sall s’apprêtait à prendre Soro Diop dans son équipe de communication à la Présidence, car il était admiratif de son immense talent. Le chef de l’Etat parle quant à lui d’un  »journaliste humble et engagé ». Soro Diop qui aimait les grandes idées, les belles formules et les métaphores repose désormais au cimetière de Kanel dans la région de Matam.

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