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LES CHALLENGERS D’ORANGE, FREE ET EXPRESSO DANS L’ENFER DE LA RÉGULATION

L’ARTP est-elle un organe de régulation des télécoms sénégalais ou un instrument d’étranglement des challengers d’Orange au bénéfice exclusif de ce dernier ? Sans même évoquer les mises en demeure intempestives, répétées et souvent sans cause réelle, que l’organe de régulation signifie à certains des challengers d’Orange, Free et Expresso en particulier, il semble que l’injustifiable commence vraiment à…se voir.

D’abord, sur la forme, il devient urgent de convoquer le principe de réalité et d’affirmer que dans sa composition actuelle, le collège de l’autorité de régulation des télécommunications au Sénégal n’a plus à émettre quelque avis que ce soit du simple fait de sa forclusion. Car selon le Décret n° 2014-12 du 9 janvier 2014 portant nomination du président et des membres du collège de l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP), le collège est composé de sept membres, nommés par décret pour un mandat irrévocable de cinq ans non renouvelable. Pour cette simple raison, ces membres qui pourrissent la vie de certains challengers d’Orange, n’ont rien à y faire depuis maintenant 3 ans. Même si un prétendu décret a été pris dans le but de prolonger leur mandat, nous pensons que ce dernier serait en violation flagrante des textes et notamment le décret du 9 janvier 2014 qui parle expressément de « mandat irrévocable de cinq ans non renouvelable ». De toute façon, le fameux « décret de prolongation » demeure introuvable. Ainsi, le président Abou Abel Thiam et ses collaborateurs siègent tous en toute illégalité au collège de l’ARTP. L’État sénégalais doit-il couvrir des décisions illégales prises par ce collège forclos sur proposition du tout puissant Abdou Ly, DG de l’ARTP du haut de sa tour des Almadies ? l’État trouverait-il intérêt du fait de sa participation au capital d’Orange, à voir les concurrents affaiblis par certaines menées agressives de Abdou LY et de Abou Abel Thiam afin de fragiliser ces derniers ? C’est juste une question que le gouvernement sénégalais doit s’atteler en toute sérénité à éclaircir. Voilà pour la forme.

Quant au fond, les tergiversations et les enquiquinements imposés aux challengers d’Orange comme Free et Expresso, matérialisés par les bouleversements injustifiés du principe bien admis de l’asymétrie, commencent vraiment à faire désordre et à peser sur l’économie même de ces derniers opérateurs.

L’asymétrie est un mécanisme qui consiste à appliquer des tarifs différents entre opérateurs. Ce tarif est le montant reversé par un opérateur lorsque son abonné effectue un appel vers le réseau du concurrent. Ces tarifs d’interconnexion constituent des leviers pour équilibrer le marché surtout lorsque de nouveaux challengers arrivent. Cela leur permet de soutenir leurs lourds investissements et de ne pas être asphyxier par un opérateur historique et ultra dominant.

Lorsque les bases des abonnés des opérateurs téléphoniques sont fortement disproportionnées, il s’ensuit un déséquilibre au niveau de la viabilité du modèle économique des autres acteurs du marché.

A titre d’exemple, il faut savoir que l’opérateur Orange Sénégal détient 60% du parc mobile et près de 70% de la valeur totale du marché. C’est la raison pour laquelle, après une farouche bataille d’arguments, les challengers avaient obtenu du régulateur une asymétrie d’interconnexion sur 2021 qui leur permettaient de réduire leurs charges.

C’est cette asymétrie rudement obtenue qui a été totalement balayée par cette décision N° 2022 – 021 du 28 novembre 2022. Ainsi, le collège de l’ARTP offre à nouveau à Orange la symétrie et ce jusqu’en 2025 modifiant et les règles et les équilibres. Abou Abel Thiam et Abdou Ly changent, se faisant, les fourchettes de ristournes dans un sens qui pénalise véritablement les concurrents et challengers d’Orange. Pire, cette décision va freiner fortement la croissance des challengers, menacer des milliers d’emplois et ralentir les investissements.

Il est donc important et vital que les tarifs qui sont appliqués soient revus pour un équilibre et pour la survie des opérateurs challengers. Encore une fois, des milliers d’emplois sont en jeu avec des familles derrières mais aussi l’équilibre même du marché des télécommunications. L’État, quels que soient les intérêts qui le lient à Orange, doit prendre ses responsabilités et arbitrer sans faiblesse coupable cet imbroglio anticoncurrentiel, en classant sans effet les décisions prises par un collège qui n’aurait plus dû être là depuis trois années déjà, et en veillant à l’équité des engagements pris pour véritablement réguler un secteur en pleine mutation.

Orange n’a pas besoin de l’aide d’une régulation cupide et devrait savoir qu’à vaincre sans péril on triomphe sans gloire.

Abou A. Lizé est Geek équitable et compulsif.

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