LES MÉSAVENTURES D’UN JOURNALISTE AMÉRICAIN ARRÊTÉ EN RDC
Stavros Nicolas Niarchos était sur le terrain, dans le sud-est de la RDC, lorsqu’il a été appréhendé par les services de renseignements en compagnie de son confrère, le Congolais Joseph Kazadi. Ce dernier est toujours en détention, tandis que le journaliste américain vient d’être libéré.
Son calvaire aura duré cinq jours et demi. Stavros Nicolas Niarchos, journaliste américain de 33 ans précédemment arrêté en RDC par l’Agence nationale de renseignements (ANR) avec son confrère congolais Joseph Kazadi alias Jeef, a recouvré la liberté dans la nuit du lundi 18 au mardi 19 juillet 2022.
« Je suis rentré hier. Aucune charge n’a été retenue contre moi ou Jeff », a-t-il fait savoir dans une déclaration datée du 20 juillet 2022, appelant à la libération immédiate de son ami et confrère toujours maintenu dans les liens d’une détention qualifiée d’extrajudiciaire.
Les deux journalistes étaient en effet en règle au moment de leur arrestation, à en croire Stavros Nicolas Niarchos qui travaille pour deux journaux bien connus aux Etats-Unis, The Nation et The New Yorker. Il affirme avoir bénéficié d’une accréditation dûment validée par le ministère de la Communication dans le cadre d’un travail sur les liens entre le secteur minier congolais et les séparatistes du Katanga dans cette riche province minière.
Niarchos explique que son enquête l’a amené à s’intéresser aux produits liés à l’exploitation artisanale des mines de cobalt, de cuivre, decoltan, entre autres dans le sud de la RDC. Ces produits ont un impact important sur l’économie mondiale d’où, selon lui, « l’intérêt public de comprendre les sources de ces minerais ».
Devoir de vigilance
« Nous avons été arrêtés en pleine préparation d’une interview », a-t-il écrit sans plus de détails à propos de leurs interlocuteurs. Selon un fonctionnaire du gouvernement anonymement cité par l’AFP le 17 juillet 2022, Stavros Nicolas Niarchos aurait « pris contact avec des milices locales » et « effectué des mouvements préalablement non signalés aux autorités ».
Selon cet officiel, c’est cela qui aurait justifié son arrestation pour les besoins d’un interrogatoire sur « ses contacts étroits avec des groupes armés ». Une décision motivée selon lui, par un devoir de vigilance de la part de l’État depuis l’assassinat de deux experts de l’ONU au Kasaï dans le centre du pays en 2017.
Plaidoyer
« Le journalisme n’est pas un crime », lance Stavros Nicolas Niarchos qui, au-delà d’être journaliste, est le petit-fils de Stavros Niarchos, un célèbre milliardaire armateur grec. Aussi, le journaliste regrette-t-il la saisie de son passeport au moment de son interpellation par les agents de renseignements, ainsi qu’une divulgation non autorisée de ses données personnelles sur les réseaux sociaux.
L’arrestation de ces deux journalistes a fait l’objet d’une condamnation de la part de l’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ), le 19 juillet 2022. L’organisation présidée par Georges Kapiamba a par ailleurs plaidé, dans une lettre adressée au patron de l’ANR et disponible sur Twitter, pour la libération de Joseph Kazadi, détenu dit-elle, sans droit de visite.
Selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) basée à New York aux États-Unis, il y aurait au moins deux autres journalistes actuellement en détention en RDC, et ce depuis leur arrestation par les forces de l’ordre le 10 janvier 2022.